Faut-il avoir peur de l'intelligence artificielle ? Entre révolte, emplois...

L'intelligence artificielle générative, qu'il s'agisse de la création de textes, d'images, de voix ou de musique, connaît une progression fulgurante. Ces avancées suscitent à la fois fascination et craintes, légitimes ou non. Il est important de faire un état des lieux des principales inquiétudes liées à cette technologie en constante évolution.

L'une des peurs les plus répandues concernant l'IA est celle d'une intelligence artificielle consciente qui se rebellerait contre ses créateurs. Les scénarios de science-fiction, tels que ceux présentés dans les films "2001, L'Odyssée de l'espace" ou "I, Robot", ont souvent illustré cette hypothèse. Les chercheurs désignent cette hypothétique "IA consciente" comme une "intelligence artificielle générale" (AGI en anglais). Contrairement aux clichés véhiculés par la science-fiction, une IA consciente ne serait pas nécessairement rebelle. Les entreprises qui poursuivent cet objectif, comme OpenAI, estiment qu'une IA plus intelligente que les humains pourrait aider à résoudre de nombreux problèmes, tels que les maladies ou le changement climatique. Cependant, les IA actuelles sont encore très éloignées de cet objectif. Par exemple, "ChatGPT ne 'réfléchit' pas du tout comme un humain", selon Alexandre Lebrun, entrepreneur et PDG de Nabla, une startup utilisant l'IA dans le domaine de la santé. De plus, les techniques actuelles ne garantissent pas la création d'une AGI. Yann Le Cun, l'un des chercheurs les plus réputés en IA, déclare qu'il n'a pas de doute quant à l'émergence d'IA surhumaines à l'avenir, mais que nous n'avons pas encore de plan précis pour les créer et qu'il est donc prématuré de réfléchir à la manière de les rendre inoffensives pour les humains.

Une autre inquiétude réelle, et non seulement liée à la science-fiction, concerne la prolifération des fake news. Les IA génératives posent déjà des risques concrets dans ce domaine. Il devient de plus en plus facile de créer des images ou des voix artificielles ultraréalistes, telles que des fausses images d'explosion au Pentagone ou des vidéos utilisant les voix de personnalités politiques. Bien que ces créations ne soient pas encore parfaites, elles s'améliorent rapidement, au point qu'il deviendra bientôt difficile de distinguer un média authentique d'un autre créé de toutes pièces. Cette situation soulève des préoccupations majeures quant à la propagation de la désinformation et à la perte de confiance générale. Si l'on ne peut plus distinguer le vrai du faux, il existe un risque de remettre en question la véracité de toutes les informations. La lutte contre les fake news est devenue un enjeu démocratique crucial, selon Jean-Gabriel Ganascia, chercheur en intelligence artificielle au Laboratoire d'Informatique de Paris VI.

En ce qui concerne la détection des médias générés par IA, des techniques de "watermark" sont envisagées, consistants à intégrer des marques distinctives ou des signatures invisibles dans les médias générés par IA. Ces marques permettraient d'identifier et de tracer l'origine des contenus, facilitant ainsi la détection des contrefaçons.

Cependant, malgré ces avancées, la lutte contre la désinformation générée par l'IA reste un défi complexe. Les modèles d'IA évoluent rapidement et peuvent s'adapter aux techniques de détection, rendant nécessaire une constante adaptation des méthodes de vérification.

Outre les fake news, l'utilisation abusive de l'IA générative soulève également des inquiétudes en matière de vie privée et de sécurité. Les modèles d'IA peuvent être utilisés pour créer de faux visages, de fausses identités ou même de fausses vidéos compromettantes. Cela pourrait avoir des conséquences dévastatrices, telles que l'usurpation d'identité, le chantage ou la manipulation de l'opinion publique.

Pour faire face à ces problématiques, des mesures réglementaires et législatives sont en discussion. Certaines entreprises et organisations appellent à l'élaboration de normes et de politiques pour encadrer l'utilisation de l'IA générative, en veillant à préserver la confiance du public, à protéger la vie privée et à prévenir les abus.

En conclusion, l'intelligence artificielle générative offre des possibilités fascinantes, mais soulève également des inquiétudes légitimes. La perspective d'une IA consciente et rebelle reste pour l'instant un sujet plus proche de la science-fiction que de la réalité. Cependant, la prolifération des fake news, la perte de confiance dans les médias et les atteintes à la vie privée sont des préoccupations réelles qui nécessitent une réflexion approfondie et des actions concertées. Il est essentiel de trouver un équilibre entre l'exploitation des avantages de l'IA générative et la mise en place de réglementations et de mécanismes de contrôle appropriés pour prévenir les abus.