Place de la Victoire à Bordeaux l'été dernier.</strong><strong>
Florian et Olivion Ordonez, deux frères de 19 et 23 ans font un rap drôle et décalé qui a su séduire un sacré paquet de monde en seulement deux ans d'existence. Mais qui sont vraiment ces deux phénomènes ? Voici un entretien réalisé par le blog ChansonFrançaise avec les deux frangins.
On faisait le tour de France dans un mini-bus pour des mini-concerts gratuits. Je me souviens de la place de la Victoire, c'était énorme. Je me souviens surtout de la chaleur en fait, un truc de ouf'! Et la gentillesse des Bordelais: on a revu les images il n'y a pas longtemps, formidable.
L'écriture. On est des passionnés d'écriture depuis tout petits. Des passionnés de mots et de musique. On a toujours écrit dans notre chambre, avec mon frère, depuis toujours ou presque. Quelques chose de naturel. Le conservatoire pendant nos années de primaire, de collège et début de lycée, et l'écriture en parallèle... et ça a fini en groupe de rap.
Notre mère est passionnée de chansons à textes, style Cabrel. Elle nous a amenés à pas mal de soirées slam. On a eu cet amour-là grâce à elle mais aussi à une prof de CM2 qui nous faisait lire pas mal de poèmes et qui nous faisait écrire. Une prof que mon frère a eu logiquement en premier: on a trois ans d'écart. On est tombés amoureux du rap assez tôt pour des petits comme nous, notamment via IAM et l'album mythique "L'école du micro d'argent". Un choc, une révélation.
Premiers pas. On s'entraînait dans la chambre en rêvant au groupe que l'on allait monter. Florian et Olivio, Florio et Oli: on ne savait pas trop... puis Big Flo et Oli! On a fait pas mal de scène locales sur Toulouse. Cela a pris sur internet avec un battle du "Rap contenders" qu'on a fait il y a quatre ou cinq ans, puis tout ce qu'on sortait avait plus d'impact.
Plumes. Chacun s'écrit ses couplets, on discute beaucoup, on cherche un refrain commun. On est toujours dans la même pièce alors ça circule vite! Pas de règle: le thème peut venir de mon frère et le reste de moi. On est souvent touchés par les mêmes choses, logique.
https://youtu.be/lNR_LkDju6g
La maturité.On ne se rend pas trop compte. On est des hyper-curieux, assez ouverts sur tout, on aime se mettre dans la peau d'autres personnages, dont l'univers est assez loin. Plus simple à écrire souvent!
"Le bouchon".Je sortais de cours et du métro, et je tombe sur un énorme bouchon, je me suis mis à regarder chaque personne dans les voitures en imaginant la vie de chacun. Un bon exercice de style, comme un petit court métrage.
Leur rap.On est des passionnés alors le regard est un peu faussé: on est amoureux. Pas mal de côté négatifs, surtout en ce moment: de la violence, des armes, des filles, de l'argent. Lassant. On n'y pense pas et on se démarque en s'assumant, différents: pas musclés, pas une vie rêvée, juste nous, sincères. On ne s'est pas soucié de se démarquer d'abord et réalisé qu'on faisait un rap différent en discutant avec les gens à la fin des concerts.
On touche les gens quand on raconte nos vies, quand on est vrais. Sur scène, en studio, dans le bus ou dans le métro, malgré la vie un peu différente qu'on commence à vivre. L'impression sincère d'être potes avec les gens qui nous écoutent.
L'album "La cour des grands".On se le rêve depuis des années et des années. Un rêve de gosse, pas forcément réaliste. Et puis je suis le plus jeune disque d'or du rap en Français, les salles sont pleines ou presque: c'est dingue et à la fois on l'a tellement voulu, on a tellement bossé... On a mis de côté les thèmes, les morceaux... Certains sont très vieux comme "Marco", évidemment retravaillés.
Toulouse.Une ville qu'on adore. Le coeur de notre inspiration. On y a vécu des trucs de dingue. Sans faire le nostalgique, je trouve qu'il y avait beaucoup plus de scènes ouvertes quand on était petit. Moins maintenant. On rappait avec un reggaeman, discuter avec un rocker, un rugbyman, une caillera de banlieue.
Zebda.On les a découverts comme tout le monde avec les tubes monstrueux de l'époque. On les a beaucoup croisés, ils nous ont donné beaucoup de conseils. Et voilà: on partage la scène avec Magyd dimanche à la Halle aux Grains dans le "Toulouse con tour", c'est super.
Le succès. C'est monté progressivement: on réalise à quel point on a de la chance de faire de la musique, quand des potes ne savent pas encore quoi faire, ou à la fac en train de déprimer. Une vie de dingue même si contrairement à ce qu'on peut croire, cela demande beaucoup d'énergie. Des gros choix sur nos épaules de jeunes. Mais c'est un kif, c'est clair.
https://youtu.be/LRnB4iaDIb0
La scène.Un kif depuis tout petit, ça! Juste la suite du chemin donc. Des petites scènes à maintenant, on a progressé dans le plaisir. La première partie de Sexion d'Assaut (dont on était fans à l'époque) au festival Alors chante! de Montauban a par exemple été très importante pour nous, une de nos premières grosses scènes.
Petit frère.J'ai un avantage: on me pardonne quand je fais des erreurs et ça c'est cool. On passe des super moments. Uune expérience de dingue de vivre ça à deux. Comment on aurait fait tout seul? Une chance, encore et toujours. On est les deux seuls de la famille, heureusement pour ma mère. S'il y en avait eu quelqu'un d'autre, il aurait été dans le groupe.
La maman. On en parle beaucoup dans nos textes. Un vrai personnage. Sans elle, on ne serait pas à ce niveau-là. Une ouverture d'esprit énorme pour nous laisser faire du rap, des erreurs parfois, pour nous accompagner dans des festivals qui n'étaient pas du tout dans son univers. On la remercie chaque jour.
Le spectacle.Un grand écran, un DJ pour le hip-hop, un guitariste-violoncelliste, Flo qui joue du piano et un peu de percus, moi de la trompette. Et des surprises des impros. Il nous tarde vraiment... on est excités comme des puces, ça va être ouf.
Réalité.On est des vrais curieux. Je peux être touché par une discussion avec un pote de mon père qui a un problème. Hop, je rebondis sur un thème, une idée de chanson. On emmagasine dans des tiroirs de notre tête et on les rouvre au moment de l'écriture. Des moments de vie qui finissent au bout de nos plumes.
La France de 2016.Un regard plutôt positif. Surtout sur les jeunes qui forment l'essentiel de notre public. Depuis qu'on voyage beaucoup, qu'on rencontre les gens, on réalise que beaucoup de choses se font, beaucoup d'envies sont là. Ils ont motivés, Internet est une chance à saisir. Des choses tragiques se sont passés mais on essaie de répondre par le positif, l'enthousiasme. On va grandir avec notre musique, on sera peut-être plus engagés, plus dans le fond des choses. On grandit avec notre public, avec notre album. On grandit avec notre pays et on est plutôt contents.